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Montchat du XX° au XXI°siècle
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Montchat du XX° au XXI°siècle
  • Collecte de données socio-historiques sur le quartier de Montchat, depuis le début du XX°, ou l'Entre-2-Guerres à nos jours. attention les abonnements anonymes sont supprimés. Désolés pour les pub envahissantes depuis le covid…
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28 avril 2022

Bonfy : Témoignage Montchatois -3

La Société d'Histoire de Lyon Rive Gauche a œuvré de 1921 jusqu'en 2012 : réunissant des amateurs éclairés, des observateurs, des progessionnels, mettant en valeur l'ancienne Guillotière et publiant des bulletins feuilletonnés qui sont disponibles aux archives Municipales et aux Archives Départementales, à la Bibliothèque Municipale de la Part-Dieu. Elle a cessé officiellement ses activités en janvier 2013 et a transmis ses fonds à la Société d'Histoire de Lyon. Elle a été un témoin de l'évolution de ce territoire et a mis en valeur les archives privées…

La famille Bonfy
Exploitant agricole à Montchat

Suite au récit de Georges BAZIN,
voici maintenant un complément de texte, cette fois tiré des échanges avec Mme Piolat,
ce 12 novembre 2011.

La dernière ferme des Bonfy fut celle que Jean-Marie Bonfy (le grand-père de Marguerite, né en 1849), occupa avec sa famille depuis 1888, et que son fils Jean-Marie Claude Bonfy (le père de Marguerite, né en 1888) finit par racheter en 1919. Cette ferme était située au 103 chemin St Denis de Bron (rue Trarieux). Le bâtiment principal de cette ferme est toujours existant.

Jean-Marie Bonfy fils (le frère de Marguerite), était né en 1906. Il était l’aîné d’une famille nombreuse. Il avait vu son père, Jean-Marie Claude, partir à la guerre (21ème régiment d’infanterie, C14.3, section d’Angins, secteur 77). À l’âge de huit ans, il avait été confié au très jeune Jean-Marie Bonfy le rôle de tenir la ferme pendant que son père était au front. Ce jeune garçon tint ce rôle tout au long des quatre années de guerre. On imagine qu’il avait dû faire preuve d’un très grand courage, tout comme sa mère, pour tenir cette exploitation au cours de ces terribles années. Son grand-père (Jean-Marie, né en 1849), restait à la maison, mais il ne pouvait l’aider, car il était paralysé. Le grand père est mort en 1916.

Capture d’écran 2022-07-09 à 21

Marguerite Bonfy (Mme Piolat), est née un matin du 26 novembre 1919. Elle était allée à l’école dès l’âge de deux ans (soit en 1921), car son père, Jean-Marie Claude, était revenu malade de la guerre, à cause des gaz. L’école était avenue du Château. Mme Piolat se souvient que l’institutrice de Montchat était une femme remarquable.

Dès son plus jeune âge, Marguerite Bonfy (Mme Piolat) allait loin dans les champs alentours pour faire paître les vaches ou les moutons. Les troupeaux faisaient cinq ou six vaches. Les terrains cultivables autour de la colline de Montchat étaient très étendus. Marguerite Bonfy pouvait se rendre jusqu’aux champs où se situe actuellement l’hôpital Desgenettes. Elle relate un souvenir marquant de son enfance, au sujet des enfants de la ferme devant garder les vaches dans les champs. Cette tâche paraissait assez simple, cependant cela demandait une certaine attention. Un jour, une vache avait échappé à la surveillance de Marguerite. L’animal s’était rassasié d’une trop grande quantité de luzerne, et avait « gonflé ».Les vétérinaires et ceux qui connaissent ce problème vous diront que voir une vache qui gonfle comme un ballon est assez impressionnant ; ceci d’autant plus pour Marguerite, qui était une enfant à l’époque. La vache avait tellement gonflé, qu’elle en était morte. La vétérinaire, une maîtresse femme très appréciée, n’avait pas pu la sauver. Bien qu’étant petite, Marguerite se souvient de la catastrophe pour la ferme et de la peur qu’elle avait eue à s’être fait beaucoup gronder.

La dernière vache de la ferme a été vendue en 1936. La plupart des moutons avaient été vendus bien avant. C’est cette vache, «la dernière», qui figure sur la photo ci-dessous.

Capture d’écran 2022-07-09 à 21

Voici quatre agrandissements de la photo des moissons de 1919, montrant la famille Bonfy.

Capture d’écran 2022-07-09 à 21

Capture d’écran 2022-07-09 à 21

Au cours de sa vie, le frère André avait accumulé beaucoup de photos.
Mais qui sait ce qu’elles sont devenues ? Peut-être les retrouvera-t-on un jour ?

 

Les temps de guerre étaient difficiles, comme le montre l’anecdote suivante. Au soir des moissons dans les champs alentours, les épis de blé coupés mais non battus avaient été ramenés dans la cour de la ferme des Bonfy, afin de les battre ultérieurement pour séparer le grain de la paille. La récolte de ces épis de blé formait de gros tas, que l’on appelait des paillers. Un soir, un malfrat était venu mettre le feu à un pailler, ce qui avait brûlé toute la récolte. Le grand père paralysé avait vu le départ de feu. Il criait pour alerter, mais il ne pouvait rien faire d’autre. Heureusement, le feu n’avait pas pu se propager aux bâtiments. Cette anecdote montre à quel point les temps étaient durs. Comme si les malheurs de la guerre de suffisaient pas, la lutte pour survivre était un combat bien difficile pendant ces années noires.

La ferme permettait au gens du quartier de s’approvisionner en lait. Les gens des alentours envoyaient les enfants au lait à la ferme. Pour se faire, les fenotes (les femmes) disaient à leurs gones : « Va remplir la Berthe ! ».

Le lait des vaches permettait aussi de produire du beurre. Il fallait pour cela le travailler à la baratte. Le beurre se conservait dans un seau que l’on mettait dans le puits, pour le tenir au frais. Mme Bonfy mère faisait aussi le beurre, grâce à cette baratte.

La ferme avait des vaches, mais comme souvent, pas de taureau. Pour mener la vache au taureau, il fallait se rendre vers les Essarts (derrière les champs occupés maintenant par l’hôpital Desgenettes), où une ferme, au coin de la rue des Essarts, avait un taureau.

La terre du Parc Chambovet était bonne à la culture dans certains endroits, mais dans d’autres, notamment « du côté des Girardet » (certainement en haut à droite, côté Nord-Est), on disait que c’était « tout du sable ».

Autour de la ferme, on avait pris soin de planter des arbres fruitiers de toute sorte. C’était bien-sûr un grand plaisir de bénéficier, au fil des saisons, de toutes ces variétés de fruits.

Comme c’était l’usage à l’époque, Mme Bonfy mère allait vendre les produits du jardin aux marchés de la Ville.

Capture d’écran 2022-07-09 à 21

 

Avant la première guerre, Mme Bonfy mère avait embauché un jeune homme de 14 ans. Il était parti à la guerre à l’âge de 18 ans, et il en était revenu. Il est mort à 54 ans. Il était presque un frère pour Jean-Marie, et il n’avait jamais quitté la maison Bonfy.

Jean-Marie Bonfy père avait lui aussi survécu à la guerre. Mais il avait été gazé. Il en est mort quelques années plus tard, en 1921. Et pour ajouter à la souffrance, son exposition aux gaz, pourtant bien réelle, n’avait pas été enregistrée et reconnue par les autorités.

Mme Bonfy mère avait eu trois enfants (dont Marguerite en 1919). Mme Bonfy mère était elle-même l’ainée de dix frères et sœurs ! Son mari, Jean-Marie Bonfy père, était l’aîné de six ! C’est dire de la vie certainement très laborieuse qu’ils avaient dû tous deux mener, ceci dès leur plus jeune âge, pour soutenir leurs parents et pour participer à l’éducation de leurs frères et sœurs.

Après la première guerre, malgré les malheurs accumulés, la perte du grand-père (1916) et du chef de famille (1921), les membres de la famille Bonfy ne perdent pas courage. Ils se lancent progressivement dans le transport et la livraison de marchandises. Leur grande richesse était d’avoir acquis un camion, ce qui était rare à l’époque. Le camion permettait de livrer les maisons de Lyon en charbon, ou encore de livrer du gravier ou divers matériaux. Mais à l’éclatement de la seconde guerre mondiale, le camion fut réquisitionné par l’armée française. Ce fut un nouveau coup dur pour la famille Bonfy, car elle perdait son moyen de subsistance.

Un des oncles Bonfy avait cependant monté une affaire d’assainissement et de vidange des fosses. Un métier important à cette époque, car les réseaux de collecte des eaux usées n’étaient pas toujours structurés.

Une anecdote amusante donnée par Mme Piolat : après les années 45, dans la cour de la ferme se trouvait un coq que l’on appelait De Gaule, et une oie nommée Jeannette !

Voilà quels étaient les principaux points du récit de Mme Piolat, ce 12 novembre 2011, au sujet de la famille Bonfy et de leur vie à la ferme de la rue Trarieux, au début du XXème siècle

Christian D. 2013

suite dans les prochaines semaines : Parc Chambovet

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